Eric : Qui est Patrice Blanc ?

Patrice Blanc : Je suis adjoint au Maire de Mouriès en charge des questions de la Culture et des Traditions.

Hors de la Mairie, si on ne me voit pas aux Arènes ou lors de manifestations locales, je suis en France ou à l’Etranger pour chanter des opérettes ou de l’Opéra depuis maintenant environ 10 ans… c’est le temps nécessaire de formation musicale et technique pour un chanteur d’accéder sur des scènes. J’ai ainsi eu la chance que ma passion devienne mon métier.
Enfant, j’étais membre du groupe folklorique local "Les Olivarelles". Je jouais du galoubet tambourin. Avec ce groupe, j’ai appris à aimer la tradition, j’ai voyagé, effectué des échanges avec des groupes d’autres régions de France et d’Europe. C’est comme cela que m’est venue cette passion pour notre culture et le costume.
Depuis l’âge de 14 ans, j’ai ma place à l’année aux arènes de Mouriès, et, je suis un féru de taureaux, déjà à l’époque j’allais avec des amis de Mouriès à toutes les courses de Provence et du Languedoc.

En 1989, la municipalité a changé, on m’a demandé de m’investir un petit peu..
Finalement, je suis entré au Comité des Fêtes à Mouriès et au Club Taurin local.
Ce que j’ai fait depuis.

Eric : La fête des olives vertes, une belle réussite ?

Patrice Blanc : Au sein du Comité des Fêtes, en 1990, j’ai proposé des groupes folkloriques pour la fête des Olives vertes. A l’origine de la fête des olives, il n’y avait que trois groupes qui défilaient, aujourd’hui ils sont plus d’une vingtaine. Je suis assez fier d’avoir pu réunir autant de participants costumés à l’évolution de cette fête. C’est un peu mon bébé. Je le surveille, le protège...
C’est un évènement sur lequel je continue à veiller. Je pense que nous sommes arrivés à une qualité dans la présentation des groupes, des costumes, des danses, et du spectacle proposé...
Sans prétention, le spectacle de l’an dernier était très beau pour un petit village comme le notre. Grâce à tous les bénévoles, et grâce aussi aux groupes folkloriques invités. Un parfait exemple est la collaboration proposée par le temps du costume de Nîmes et l’atelier du costume de Maillane oeuvrant ensemble pour nous présenter des tableaux des costumes du pays d’Arles de toutes les époques. Il est certain qu’il y a un coût derrière ces manifestations mais l’ensemble du village profite des retombées de cet évènement qui attire chaque année plus de monde.

Eric : De l’organisation d’une capelado à la palme d’Or…

Patrice Blanc : A l’époque, le Club Taurin m’avait demandé de créer un évènement dans les arènes avant la finale des Olives Vertes... Les groupes ont donc dansé, les Arlésiennes avec des branches d’oliviers formèrent une haie d’honneur au raseteur, puis on en est venus à créer des petits tableaux.
Un jour, Morade Bourmel a souhaité organiser son jubilé à Mouriès. Nous avons créé des chorégraphies avec l’équipe du Club Taurin, et la Fête fut très réussie…..
Quand Morade fut nommé aux affaires taurines de Beaucaire, il organisa sa première capelado seul, et, il fut surpris par les difficultés inhérentes à la mise en scène.
Concevoir, organiser, donner les explications... C’est un travail a part entière, un métier, si l’on peut dire !!!. Il n’a pas aimé le résultat obtenu. Il m’a alors appelé et demandé de collaborer avec lui à l’organisation des spectacles dans les arènes de Beaucaire.
L’année suivante un article de Domynique Azema relatait dans le Midi-Libre l’organisation de la capelado de la palme d’or à laquelle j’ai contribué à la conception « Coup de chapeau… Fini les arlésiennes ventripotentes et essoufflées, enfin, de belles dames en costume traditionnel,… fini ces cavaliers dépenaillés et des chevaux crottés. Enfin une présentation correcte mettant en valeur nos traditions".
Suite à cette Palme d’Or, j’ai travaillé sur Nîmes pour ma première finale aux As, j’ai ensuite mis en scène les 50 ans du Trophée Taurin en Arles. Ce fut la dernière fois sur cette ville d’Arles, et je confirme que l’adage est fort vrai… « Nul n’est prophète en son pays… ».

Je reste fidèle à certaines organisations des arènes de Nîmes, de Beaucaire et quelques autres…

Eric : Les Fêtes de Beaucaire...

Patrice Blanc : La ville de Beaucaire m’a également demandé de prendre en charge le défilé d’ouverture des fêtes de Beaucaire, pour le grand défilé des fêtes de la Madeleine.
En 2005 puis en 2006, nous avons réalisé un travail extraordinaire sur ce défilé, comprenant plus de 750 participants. Je me suis demandé, à l’heure de la création des tableaux, comment nous allions réaliser nos projets et gérer cette foule, alors que nous n’avions que deux répétitions : La première partie du spectacle sur un soir, la deuxième sur un autre soir, mais avec uniquement les responsables de groupes, qui eux devaient ensuite expliquer la scénographie et le déroulement du spectacle à leurs adhérents.

Ce fut un nouveau challenge et fort heureusement une grande joie, loin de la galère...
…souvent prévoyant, je pense toujours le pire. Je demande des garanties dès le départ. Je travaille avec le concours du service de la culture et des festivités de la ville, à qui je transmets mes requêtes… on discute, on négocie... dans la limite des besoins, et de ce que je dois ou ne peux accepter. Ce soir là, je souhaitais certains jeux de lumières, tels et tels groupes, et j’ai obtenu satisfaction. Ensuite, commence le travail, dès le mois de Décembre pour le défilé de juillet de l’année suivante. Pour cette année, nous avons commencé au mois de Novembre, à raison de deux à trois après midi par mois environ.

Eric : Quelle était la thématique du défilé de Beaucaire ?

Patrice Blanc : Ce sont les élus qui décident de la thématique du défilé, Christophe ANDRE Adjoint à la Culture sur Beaucaire, avec sa commission ont choisi en 2006 la thématiques « contes, mythes et légendes ». On s’est donc réunis, et nous avons dialogué sur le futur projet.
L’idée de fées descendant du château de Beaucaire pour conter des histoires de la ville de Beaucaire fut retenue.
Christophe ANDRE souhaitait que l’on parle de la Foire de Beaucaire. Nous avons intégré ce tableau de la foire au spectacle, puis des faits marquants du passé de la ville,… le Monarque du château, le Drac…. aussi à ma requête, la rencontre de Buffalo Bill et du Marquis, puisque 2006 fut un anniversaire important de cette rencontre…il existait des faits historiques intéressants de sa tournée en Camargue.
Voilà, on crée ainsi les tableaux, puis on rencontre Christian BINDONI qui écrit les textes. Je sélectionne dans les nombreuses pages que Christian écrit pour adapter le spectacle et le mettre en scène, en lumières, et en musique.

En 2006, Le parcours du défilé, lui est "imposé" par les services de la culture de la ville... une volonté de contenter les nombreux commerces de Beaucaire , ce qui rallongeait d’autant la durée du défilé. Le spectacle des arènes annoncé à 22h00 n’a pu démarrer à l’heure, car la qualité du spectacle demandait que l’ensemble des participants soit arrivé aux arènes.
En 2007, le parcours sera plus court pour les groupes, et plus pratique pour le public. Cette année, le timing devra être tenu. Il est important de respecter un horaire….

Eric : L’entrée de Sainte Madeleine devant une arlésienne agenouillée...
Un tableau du Museon Arlaten ?

Patrice Blanc : C’était l’idée... Je fonctionne quelquefois avec des coup de coeur,… ce qui est intéressant grâce à mon travail c’est la confiance gagnée de certains groupes disciplent à mes projets. Ils savent jusqu’où je peux les mener. C’est un peu novateur à chaque fois, comme de défiler avec les velets... L’atelier du costume de Maillane a eu le courage de le porter. Le public s’est interrogé sur ces pièces du costume, ... On a pu ainsi leur apporter des renseignements complémentaires sur notre costume, notre culture,.. c’est intéressant, et nous avons le devoir de promouvoir notre culture dans sa diversité lors de ces évènements...

Eric : La finale des as, c’est aussi le même travail ?

Patrice Blanc : Sur le projet de Nîmes de la finale des As 2006, il faut savoir que la préparation a demandé deux mois de travail. Il est certain que je suis payé pour cela, et ce travail de « Chargé de Mission » pour le Trophée Taurin Midi Libre est multiple et important… : Je prends contacts avec les responsables des groupes, et je prépare les contrats pour chacun…, je rédige le dossier technique, je rencontre les différents participants, leur présente et discute le projet,... je participe aux répétitions au sein de chaque groupe, et me déplace vers chaque groupe : Nîmes, Montfavet, Chateau-Gombert, Avignon, Martigues... Je rencontre les enfants et les fait travailler...
Le dimanche matin, on répéte tous ensemble la représentation de l’après midi.
… il n’y a pas de miracle… Cela ne peut pas s’organiser différemment ou alors improviser tout au dernier moment…
Dans ces moments, il faut aussi garder à l’esprit que c’est grâce au midi libre, à la Provence, au Trophée Taurin pour leur confiance et soutien...
Parfois le doute s’installe et je me pose cette question, mais si le résultat n’était pas là, qui serait responsable de l’organisation !!!!…
Aucun pas de droit à l’erreur, ce qui, vu le nombre de répétitions "générales" est d’autant plus difficile. Dans un amphithéâtre rempli de 15000 personnes, les données sont différentes d’une salle de répétition contenant 15 personnes, surtout en songeant que tu demandes quasi l’impossible à des enfants. Le jour de la finale, la gamine, jouait du violon en direct dans un amphithéâtre plein...il y avait de quoi être stressé... et pourtant elle a joué sans défaillir…
Dans ces moments, le plus beau cadeau est la réaction du public. Les gens applaudissent, la réaction est spontanée... On ne peut savoir comment le spectacle sera perçu depuis les gradins. Nous sommes quatre, en bas, reliés ensemble et connectés avec la technique. Mais pris dans l’organisation, on profite peu du résultat. Lors de ce stress, cette réaction spontanée est notre récompense.

Eric : Comment conçoit-on un tel spectacle ?

Patrice Blanc : Je dois rendre hommage a Domynique AZEMA, c’est elle qui m’a dit, Patrice je voudrais que l’on travaille autour des nouvelles générations. Je voudrais beaucoup d’enfants chantant la Coupo Santo… A ce moment précis, je me suis dit que si les enfants chantaient, il fallait les intégrer dès le départ.

Henri ITIER, également, voulait également mettre l’accent sur les enfants, notamment les Jeunes des Ecoles Taurines Fédérales.
Le fil était tiré, les enfants regardent d’autres enfants, tous sont spectateurs, tous sont acteurs. Différents tableaux se déroulent jusqu’au final sur un lâcher de ballons qui sonne comme un feu d’artifice coloré. Les ballons, tant dans la forme que les couleurs, symbolisant l’enfance et les couleurs de nos provinces…
Après, gardons à l’esprit que l’on ne peut pas tout faire dans ces lieux et ces occasions. Mon expérience traditionnelle forte me permet de rester derrière une barrière. Je sais jusqu’où je peux aller, même si des fois j’essaie de provoquer et interpeler les spectateurs, comme pour la palme d’Or… J’ai mis en scène des danseurs dont un tout en noir représentait l’âme du taureau. C’était plus contemporain. A priori, c’est passé... Parfois, je marche sur un fil dans ces moments…
Dans la même veine, pour les 50 ans du Trophée Taurin, j’ai crée une chorégraphie avec des arlésiennes et des gitanes… le spectacle débute, les gitanes entrent, et ça grondait dans les gradins... et je me suis dit, aujourd’hui, ça passe ou ça casse...puis les arlésiennes sont entrées, le public a commencé à applaudir, et en communion les gitanes et arlésiennes ont dansé ensemble,…le public comprit et félicita le spectacle...
Le texte de présentation n’avait pas été entendu…des enfants contaient Arles lieu de brassage des identités culturelles...
Les gens ont adhéré à l’idée..

Mais comme en tout, il faut du temps pour changer les mentalités. Les gens s’habitueront à de nouvelles choses...
… Je peux affirmer que cela fait chemin puisque maintenant tout le monde s’improvise organisateur de Capelado-Spectacle…..

Eric : Mistral, Baroncelli entre passé et avenir...

Patrice Blanc : Mistral a été un novateur, Baroncelli aussi.
Je ne me sens pas comme un passéiste, mais comme un novateur à mon niveau. J’aime la tradition, mais j’aime qu’elle bouge. Certains détiennent la vérité ne bougent absolument pas, par peur de déranger, ou parce qu’il existe un certain confort à maintenir les choses en l’état. La Course Camarguaise à l’origine était un évènement dans un village. On fermait une place, on faisait venir les taureaux, et les jeunes s’en amusaient. Cela a évolué, ne serait ce que par Carmen, qui vient saluer une action, alors que cette opéra a une consonance plus espagnole que camarguaise. Le trophée taurin a été créé, des organisateurs comme Paul Laurent ont codifié certains aspects de la course camarguaise...
Le costume de l’arlésienne a dans le même temps subi de nombreuses évolutions, les tissus, les couleurs ne sont plus les mêmes. Certains groupes refusent toute évolution, se retranchant derrière le caractère rassurant du passé tel qu’il était. Mais d’autres continuent à le porter et le font vivre.

Eric : La bouvine...
Faut il tout revoir dans le déroulement des courses pour les rendre plus attractives ?

Patrice Blanc : Pas tout... Chaque village a sa particularité, sa touche personnelle….
Quand j’organise, j’essaie de respecter les bases de la Capelado puis j’apporte parfois un peu de création…
Quand je vais dans certains villages, j’apprécie le charme de ce coté familial, convivial, spontané. C’est ce qui donne à la fête son coté populaire. Je crois qu’il ne faut pas aller vers le tout spectacle, tout le temps. On lasserait vite les spectateurs.
La capelado mise en scène doit rester une exception lors d’une grande course, une grande finale. Un exemple, le Club Taurin de Mouriès me réclame à corps et à cris une capelado chorégraphiée pour la fête des olives vertes… je l’ai toujours refusé... les groupes qui dansent, la grande farandole... C’est le charme et la griffe de cet évènement. Il ne faut pas le perdre, ne pas le changer, les gens viennent "pour ca"...
Les seules choses à peut être améliorer dans certaines villes sont les costumes mal constitués ou portés…certaines tenues approximatives ne devraient pas l’être par respect du public et de nos anciens.

Eric : Comment meubler le quart d’heure d’entracte ?

Patrice Blanc : Il faut des moments de pause dans un spectacle, c’est important… la course énerve, excite.
Je me rappelle de cette époque où je m’énervais sur les gradins, parce que le raseteur, ou le taureau que j’affectionnais ne réalisait pas la course qu’il aurait pu ou dû produire... l’entracte permet de laisser retomber cet agacement, cette pression de la première partie.
J’applique cette règle lors des remises de prix… la musique choisie, avant la remise des prix, est toujours une musique calme afin de permettre au public une transition entre la course et l’honneur fait aux acteurs… surtout, après les derniers taureaux qui sont par essence le point d’orgue émotionnel de l’après midi.

Eric : Comment maintenir les gens dans les arènes pour la remise des prix ?

Patrice Blanc : C’est un phénomène général, pas limité à la bouvine... Je suis allé récemment voir un opéra à Marseille. Sur les applaudissements, la récompense des artistes, une partie du public quitte son siège. C’est la mamie qui a peur de ne pas trouver de taxi, le grand-père qui ne veut pas rouler de nuit, celui qui ne veut pas être coincé dans la cohue, celui qui doit rentrer vite etc...
Mais le phénomène n’est pas nouveau. Au contraire, je trouve que les gens restent plus qu’avant, si il y a du suspens... Peut être le public serait plus tenté de rester...

Eric : Un mot pour finir...Patrice a des projets en 2007 ?

Patrice Blanc : Beaucoup….
Les évènements de Beaucaire : Le défilé de la Madeleine, et la finale de la Palme d’Or. Mouriès et ses Festivités…fête Votive et des Olives Vertes...

Des Opéras et Opérettes en France et en Espagne….