Les Carrelages de Salernes...

Une pure splendeur.

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Terres cuites et céramiques abondent dans le village fort de sa vingtaine de fabriques dont bon nombre de centenaires. Salernes vit depuis plus de deux siècles au rythme des usines de fabrication des terre cuites. Situé dans une vallée dont l’argile est de première qualité, et arrosée par la Bresque recevant les eaux de la Braque et du Gaudran, le village avait tout pour se lancer dans cette aventure.

Ainsi l’ère de la terre cuite ne pouvait que réussir. Et de fait, le village a compté jusqu’à une trentaine d’usines de carrelages, dans cet art implanté dès 1718 par un dénommé Brest qui y fabriquait déjà des malons.
Il faut dire que le bassin étant propice, il y a toujours eu une activité liée à l’argile dans la vallée, comme en témoigne des vestiges néolythiques mis à jour dans les nombreuses grottes alentour.

Enfants nous regardions la cheminée fumer et le ballet des camions allant et venant dans la cour de l’usine qui était en face de la maison...
Une nuit même, revenant à la maison après une séance au cinéma du village "La Tomette", nous avions du courir en passant devant l’usine juste après le pont vert. Le chien nous avait entendu et s’était lancé à nos trousses. A sa voix, il était ET grand, ET mal embouché... Après on raconte aux gamins qu’il ne faut pas courir...

Bref... Souvenir d’enfance.

Les choses ont changé depuis. Le pont vert a été repeint en bleu, et la cheminée a cessé de fumer. Définitivement.

La tristesse d’une usine vide, la fin d’un art. Mais il était dit que les choses ne pouvaient en rester là. Le bâtiment s’est réveillé un jour et a lentement repris une activité, différente.

L’usine vient juste de rouvrir ses portes sous la forme de la Maison de la Céramique architecturale. Ainsi transformée en musée, elle est dédiée à la mémoire des hommes et des femmes qui ont produit des millions d’exemplaires de ce petit mallon hexagonal, la Tomette.

La première salle du musée est consacré à l’histoire, la préhistoire plutôt, salernoise de la terre cuite, avant de lancer le visiteur dans la découverte de la fabrication de ce petit carreau que tout méridional connaît et reconnaît. Rien n’est en effet plus caractéristique que le tintement d’une tomette descellée, comme un de ces sons qui composent votre patrimoine culturel.

La tomette, une merveille de petit malon hexagonal de 10cm de diamètre mérite amplement un musée. Derrière son apparente simplicité se cache une foule de métiers aux secrets bien gardés et un tour de main uniques.

Une tomette ne sort pas "comme ça" d’un four. L’argile doit être extraite, mélangée à différentes terres dégraissantes, puis filtrée. Ensuite elle doit être débarrassée de son eau par décantation, puis dans les pastières.

Elle est ensuite entreposée durant plusieurs mois dans une cave humide la masse dans laquelle l’argile se fait peu à peu. De cette préparation préalable sort une argile qu’il faut encore modeler et couper. Tout ne fait que commencer et pourtant, sont déjà intervenus ceux qui ont extrait l’argile pour constituer le stock, le délayeur qui mélange les terres, et le pastonnier dont le rôle est de sortir l’argile encore trop remplie d’eau pour en faire des pastons qui sècheront au soleil. Le malonnier peut traiter l’argile stockée dans la Masse. Les étapes suivantes sont l’étirage, le cadre de découpe, l’engobage, le coupage, le cylindrage, la coupe, le rabattage, et la planche. La terre est encore crue.
Il y a déjà eu beaucoup de travail, et tout peut encore tourner court, obligeant à jeter la production. La cuisson est en effet l’étape décisive. A 1100 degrés dans un milieu clos, les réactions chimiques transforment l’argile à la rendre irrécupérable si la surveillance est en faute.

Là encore, Il faut une quarantaine de jours pour sortir une fournée, entre la préparation du four et le défournement.

Une fois défournés, il reste une étape de recettage, pour séparer les malons solidarisés par la cuisson et le calibrage.

Le musée constitue un véritable parcours initiatique à la découverte de ce petit hexagone qu’on ne regarde plus de la même façon après cette découverte.
Le trajet a été pensé par un homme de métier, l’agencement est tel qu’on se laisse aller à imaginer que l’usine s’est arrêtée hier et ne demande qu’à reprendre sa production demain.

Une production impossible, on réalise à quel point les tomettes demandent de soins, de manipulations expertes, de gestes d’hier quand la tradition constituait la brique élémentaire de la formation.

Les ouvriers pouvaient être fiers de ce qu’ils accomplissaient. Avant d’être une lumière sur la fabrication de la tomette, cette maison est un vibrant hommage à ces hommes et ces femmes qui ont pavé toutes nos maisons.

A voir absolument.

Pour aller plus loin dans la découverte de ce malon, repartez avec l’excellent ouvrage de Nicole Ulisse : Salernes de la terre à la céramique aux éditions Edisud [1]

C’est à Salernes, Quartier des Launes.
Tel : 04 98 10 43 90
www : http://terrarossasalernes.over-blog.fr
A noter En juillet et Août le musée ouvre 7jours sur 7 de 10h à 19h.

[1ISBN : 978-2-7449-0758-6

Portfolio

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