La Camargue est constellée d’une myriade de lieux nommés. A croire qu’ici, sur une terre longtemps considérée comme néfaste et dans laquelle le Rhône a dessiné de nombreux tracés, toute pierre, tout tertre a un nom.

Gaël Hemery signe ainsi son livre : "Ici, chaque tamaris a un nom, alors qu’il semble que personne n’y passe"

Ces noms viennent parfois des caractéristiques géologiques ou géographiques, des premiers propriétaires du lieu, de naufrages, de grands épisodes. D’autres sont issus de l’âme vagabonde d’un poète, de la gouaille d’un consul d’Arles ou encore du patriotisme d’un groupe de chercheurs Anglais qui sont allés jusqu’à nommer leur mare artificielle "Trafalgar Square" dans les années 60.

Aujourd’hui on traverse la Camargue en regardant passer ces noms de lieux sans plus s’attacher à ce qu’ils représentent. Ici pourtant plus qu’ailleurs l’Histoire est inscrite dans le sable. Gaël Hemery propose une visite du domaine à la fois dans l’espace et le temps. Il redessine les contours des bras perdus du fleuve, refait vivre les grands épisodes de l’agriculture : la vigne, puis le riz et son cortège d’immigrés venus travailler ici, des italiens au grecs ou aux indochinois. Il rend leur âme aux navires qui ont fait naufrage dans une embouchure dangereuse.
Il évoque ces fermiers des XIV ou XVe siècle.
Un plaisir. On redécouvre ces graus, theys, mares et marais, étangs, launes, souquets, drailles, roubines, mas, tours qui ont sculpté cette Camargue qu’on aime tant.

Il est impossible de passer au travers d’un tel ouvrage, autant parcourir le pays en gardant les yeux fermés. Lisez le et ajoutez une nouvelle dimension à votre amour de la Camargue.

Présentation par l’auteur

Être de quelque part c’est être de certains lieux.
De ceux que j’ai traversé mille fois sans me soucier des pans d’histoires qui sédimentaient dans l’antre de leurs limons. De ceux que je rêvais de parcourir en regardant devant moi la ligne noire du bois des Rièges
flotter comme un mirage sur le plat des étangs gris. De ceux que je lisais scrupuleusement sur les cartes en imaginant les sentiers qui mènent à leurs secrets. De nuit, de jour, par mistral ensorcelé ou vent marin ébouriffant, ils m’ont certainement parlé sans que je m’en rende compte, à la manière d’un chuchotement bien senti.L’esprit des lieux, je me suis rendu compte que c’était aussi l’esprit des noms de lieux. Car on ne peut s’affranchir de ce qu’ils véhiculent plus ou moins de façon explicite, lorsqu’on les prononce, pour une évocation positive, neutre ou négative.
Après ce travail parfois fastidieux, souvent réjouissant sur la toponymie de ma Camargue, je la parcours avec un autre oeil, une autre distance.
Mon amour est moins brut mais certainement plus profond. Je souhaite au lecteur de cet ouvrage la même destinée dans la relation qu’il tisse ou tissera avec ce territoire magique.