Le premier mai se tient traditionnellement la fête des gardians à Arles.
Plus de deux cents cavaliers se regroupent sur les Lices, accompagnés d’Arlésiennes puis s’engagent dans un défilé qui les emmènent vers la place du Forum où Nais Lesbros, reine d’Arles, rend hommage au Chantre de Maillane en leur nom.
Le défilé poursuit sa route jusqu’à l’église de la Major où le père Desplanches bénit cavaliers et montures avant une messe.

Tout se termine par un regroupement devant la mairie avant les jeux de l’après midi. Intronisation des prieurs Julien Bourjaillat et Mehdi Ait Idir du capitaine Frédéric Bon. Jeux de l’orange, des bouquets, course taurine avant les attendus attentes au fer des prieurs et jeu de l’aiguillette, spécialité de la Confrérie.

Une grande journée.

Cette fête ne lasse d’étonner les touristes.
Si ici, les arlésiens, camarguais et autres passionnés jettent un regard blasé sur cette concentration, il faut reconnaître qu’il y a véritablement "quelque chose" qui caractérise, qui signe cette célébration.

Deux cents cavaliers vont se regrouper, puis déambuler dans les rues de la ville. Quel premier magistrat accepterait une telle manifestation sans service de sécurité particulier, laissant badauds et cavaliers déambuler de conserve dans des ruelles étroites.

Dès le regroupement on sent cette sécurité rassurante de l’harmonie du cavalier et sa monture. Alors qu’ils se massent en haut des Lices, les photographes passent sous les naseaux des chevaux, les surprennent encore et encore sans pour autant que ces derniers ne bronchent.

La même placidité se retrouve dans les ruelles ou à l’approche de la Major quand ces mêmes cavaliers doivent fendre la foule. "Attention les pieds" chuchote un gardian, avançant résolument dans une masse compacte de personnes, serein alors qu’il guide sa monture.
Le cheval n’en est pas plus ému, trace sa route en faisant attention, lui aussi.

Ce qui pourrait n’être qu’une anecdote est pourtant l’expression d’une éducation, d’un lien particulier qui existe entre l’homme et l’animal. Cette année encore on a vu la quantité de "gardianou" qui défilaient fièrement. Il existe une relation entre le gardian et son cheval. Il n’y a pas de contrainte dans l’apprentissage du cheval, de l’homme. L’équitation de travail est une voie dans laquelle l’homme et l’animal s’engagent ensemble, tous deux ne forment plus qu’un....

Cet art que les gardians pratiquent souvent depuis l’enfance leur permet d’être aussi à l’aise au milieu des taureaux que dans des ruelles bitumées et ponctuées de plaques d’égouts dans une foule dense. Tout peut se passer, rien n’arrive.

Chacun de ces centaures est à sa place, montrant à quel point sa maîtrise, son "lien" sont simplement exceptionnels.

Cette éducation particulière est appelée "l’équitation de tradition française". Elle est à ce point exceptionnelle qu’elle a été décrite :

"L’équitation de tradition française est un art de monter à cheval ayant comme caractéristique de mettre en relief une harmonie des relations entre l’homme et le cheval. Les principes et processus fondamentaux de l’éducation du cheval sont l’absence d’effets de force et de contraintes ainsi que des demandes harmonieuses de l’homme respectant le corps et l’humeur du cheval. La connaissance de l’animal (physiologie, psychologie et anatomie) et de la nature humaine (émotions et corps) est complétée par un état d’esprit alliant compétence et respect du cheval. La fluidité des mouvements et la flexibilité des articulations assurent que le cheval participe volontairement aux exercices. "

Cette description lui a permis d’être inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO en 2011. Inscription 6.COM 13.14 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité

Emanant du cadre noir de Saumur, cette inscription englobe les gardians. Le savent ils ?

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