Les images des inondations du samedi 20 octobre sont dans tous les esprits. TV Lourdes affiche des videos sur lesquelles l’eau du Gave de Pau est tellement monté que l’autel de la grotte des apparitions a été submergé.
Là, il s’agit de plus de 500 pèlerins évacués de leurs hôtels sous les eaux. Cuisines submergées, établissements administrativement fermés...

Les lourdais n’ont pas eu à subir pareil assaut depuis 1937.

Et la Nacioun gardiano rassure ses pèlerins. Le pèlerinage prévu le samedi suivant est maintenu. Pourquoi en serait il autrement. Il s’agit là d’un roumavajo, non d’une promenade touristique.
Il faut dire que l’efficacité du personnel technique des sanctuaires est sans faille. Assistée par des renforts extérieurs, il faut moins de 24H pour effacer les stigmates de cette montée des eaux, si extraordinaire fût elle.
L’annonce du Lundi 22 est à peine croyable, l’ensemble des sanctuaires sera ouverte dès le lendemain.

Et de fait, c’est le cas...

Un pèlerinage empreint de sérénité

La Nacioun Gardiano vient à Lourdes témoigner de sa foi pour la quinzième fois en 27 ans. Tous les deux ans, fidèles au rendez-vous, les pèlerins se massent aux abords des sanctuaires.
L’organisation sans faille leur permet de se recueillir sans se préoccuper d’une quelconque logistique. Tout a été pensé, muri, préparé, prévu... Jusqu’à l’imprévisible.

Il est difficile d’appréhender ce que représente un tel déplacement de personnes. Coté cour, ce sont d’interminables discussions avec les hôteliers pour réserver les chambres des presque 1400 nuitées qu’il faut trouver, identifier, attribuer ; avec les autocaristes pour dispatcher les départs des 27 cars depuis la Provence et le Languedoc. Coté Jardin, ce sont les organisations des cérémonies, processions, salut et marches, et les services d’ordre liés. En coulisses, c’est l’acheminement des 92 cavaliers et montures, sans même parler des 50 juments et poulains de la roussataio, et le parcage des bêtes...

A sa quinzième édition, les cadres de la Nacioun gèrent l’ensemble de main de maître. Vu depuis l’intérieur du pèlerinage, tout est parfait, semble aller de soi.
Pourtant, entre les 1500 pèlerins identifiés Nacioun et les 3500 sympathisants, la foule est énorme et difficile à structurer. Pour autant, rien n’écorche cette organisation parfaite. Et il est bien question d’organisation, il suffit pour s’en rendre compte d’approcher les responsables et leurs cahiers. Tout est noté, référencé : la place de chacun, l’ordre de sortie des cortèges et responsables...

Extraordinaire d’implication et d’efficacité.

Des cérémonies empreintes de ferveur

Ferveur est le maître mot de cette dominique. Sous la présidence de Monseigneur Dufour, Archevêque d’Aix et d’Arles et la direction du Père Desplanches, ce sont douze prètres venus notamment d’Aramon, Salon, Cadenet, Vauvert... qui ont fait le voyage avec les gardians pour contribuer à ce pèlerinage.

Le samedi s’ouvre ainsi dans la Basilique Sainte Bernadette comble pour l’occasion pour une grand-messe dédiée à Saint Georges.
Cette année en effet, la Nacioun a souhaité voyager de conserve avec l’assocation multiséculaire des Gardians de bouvine l’Antique confrérie des Gardians de San Jorge. En cette année du 500e anniversaire de la confrérie, main dans la main les deux associations, gardiennes de la tradition, ont suivi toutes les célébrations sous le patronnage du Saint Patron des Gardians.

Une première messe largement bénie par un ciel toujours aussi chagrin, déversant des flots de pluie sur les habitants de la ville. Si cette pluie n’a pas empêché les pèlerins de remplir la basilique, elle a douché les enthousiasmes à l’issue de la célébration lorsque les porteurs du cierge amené par la Nacioun se sont rendus au brûloir.
Mais il était dit que le ciel serait finalement clément. Samedi à 14H, la pluie est éparse, semble vouloir cesser... pour finalement reprendre de plus belle, s’arrêter voire jouer avec les participants.
Le service d’ordre se remet en place, devant la grotte des apparitions. il est difficile de zoner un site lorsque plus de 1500 personnes doivent s’y rendre. Le matin avait déjà chauffé la sécurité, la tâche se compliquera encore et encore avec à 14h30 le salut à la Grotte, et le chemin de croix.
Finalement, il est décidé de procéder au chemin de croix à l’intérieur de la Basilique du Rosaire. La pluie ici n’a rien du crachin d’automne que l’on rencontre habituellement. Tenace, drue, elle force le respect, et encourage la fuite.

En dépit de sa taille respectable, la Basilique est trop petite pour accueillir tous les pèlerins. Les stations du "Camin de Crous" sont égrénés devant une assemblée fervente et recueillie.

La Procession Mariale

Un des temps forts des pèlerinages est la procession Mariale. Se déroulant à la nuit tombée, cette pegoulado est un témoignage fort de la foi chrétienne. Vendredi soir, celle ci s’était déroulée sous une pluie battante. Ce n’est pas le cas pour celle du Samedi. Le ciel est encore clair que l’esplanade du Rosaire se charge déjà. Une foule incroyable arrive de partout pour témoigner de son amour à la Mère du Christ. Les Cavaliers s’avancent, allument leur Pego et emboitent le pas de cette lente procession déambulant en tous sens sur la place à la suite de la Sainte Vierge.

Messe dominicale

Il est 8H30, il n’y a encore personne sur l’esplanade du Rosaire où doit se dérouler la messe deux heures plus tard. Enfin, il y a déjà les petites mains qui dépilent les chaises, bougent les bancs, organisent les cordons de sécurité... Et commencent à refluer les curieux qui veulent s’installer là-devant, au premier rang.

A la porte Saint Michel, les premières Arlésiennes arrivent et se mettent en place pour la procession. Les Arlésiennes ici sont celles que nous avons l’habitude de voir dans les villes et villages du Pays d’Arles. Pourtant, ici elles sont différentes.
Elles sont venues ici proclamer leur foi, communier dans la paix du Christ, témoigner de cette tradition chrétienne dont elles sont des gardiennes.
Recueillies, visages fermés, elles suivent encore une fois St Georges jusqu’au choeur de cette église à ciel ouvert.

Les Gardians, étendard en main ferment la marche, au pas. Même les chevaux semblent marcher sur un nuage, apaisés.

Mgr Dufour officie en ce dimanche.
Le Père Desplanches prépare la cérémonie, murmure un chuuuuuuuuuut...

Le temps s’arrête et un silence de cathédrale emplit le parc. Un sabot qui racle le bitume et deux corneilles qui crient au loin paraissent alors étonnamment bruyants aux 5000 pèlerins muets.

La célébration force le respect, l’assemblée boit les paroles de l’archevêque. "Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t’a sauvé. » Aussitôt l’homme se mit à voir, et il suivait Jésus sur la route."
Et l’assemblée ferme ses yeux embués...

Le message de ce pèlerinage se lit dans les yeux de l’assistance. Espoir, sérénité, apaisement... Les pèlerins trouvent ici ce qu’ils sont venus chercher, ce qu’ils ont amené avec eux et qui leur est révélé au gré des célébrations.

Procession du Saint Sacrement

Le Dais sous lequel le Prètre porte l’ostensoir radieux traverse les rangs d’une foule prosternée. Les chants sont triomphaux, la liesse véhiculée par le Saint Sacrement envahit maintenant l’assemblée. Les Péchés sont oubliés, les larmes ne sont plus celles de la pénitence mais de l’excès de joie...

Le pèlerinage se termine, au son de la Coupo Santo, hymne d’amour et de paix des Provençaux aux Catalans.

Le mot de la fin revient au Capitaine de la Nacioun Gardiano qui n’oublie pas de remercier tous ceux grâce à qui cette manifestation a pu être organisée. Son émotion finit par percer, un filet de voix tressaille lorsqu’il évoque sa femme.

Ils étaient deux à la tête de toute cette organisation, les Gardians l’ont réalisé à cet instant.

Osco per la Nacioun Gardiano e Gramaci.

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