Tarascon fêtait ses héros ce dimanche 28 Juin.

Ses vrais héros qui ont libéré la ville en 1945, mais aussi ses héros de légende.

Qui en Provence ne connait l’histoire de la Tarasque

La Tarasque ce monstre d’une laideur désolante, plus gros qu’un boeuf, plus lourd qu’un cheval, plus long qu’un âne et à l’haleine fétide vivait dans un trou dans les marais le long du Rhône. La bête a terrorisé toute la population tuant et mangeant les passants animaux, hommes, femmes et même enfants durant des années.
Même les chasseurs qui sont partis à sa recherche sont passés de vie à trépas.

Lors arrive Marthe.
Débarquée aux Saintes Maries de la Mer, Marthe passe et s’arrète à Tarascon. Recevant l’asile d’une famille dont le fils a été tué par le monstre, elle décide de s’en charger. Elle apprivoise la Tarasque et lui ceint le cou de sa ceinture. Elle la ramène ainsi au village où les habitants la tuent, vengeant tous ceux qui ont été mangés.

La ville commémore depuis longtemps cette victoire sur la bête.
Selon Adolphe de Chesnel, la fête date de 1474 :

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Cette fête, qui prenait son nom de Tarascon, ville où on la célébrait, avait encore été fondée, dit-on, par le roi René. Elle fut, d’après
ce que l’on ajoute, célébrée pour la première fois, le 14 août 1474, en présence de ce prince et de sa deuxième femme, Jeanne de Laval. Cette fête avait une grande célébrité et attirait beaucoup d’étrangers. Elle se reproduit fort rarement aujourd’hui. Elle avait lieu aux solennités de la Pentecôte, et les honneurs en étaient faits par des chevaliers pris dans les premières familles du pays, et qui tenaient table ouverte pour recevoir les visiteurs. Leur costume consistait en une culotte de serge rouge, un justaucorps de batiste avec manches plissées et ornées de dentelles, des bas de soie et des souliers blancs avec talons et houppes rouges,chapeau monté avec cocarde rouge, ruban de même couleur en guise de collier et un autre ruban en sautoir au bas duquel pendait une petite tarasque en argent. Le jour de la Pentecôte, ces chevaliers assistaient aux vêpres, mais en bourgeois, puis ils parcouraient la ville avec des tambours et des trompettes et distribuaient des cocardes rouges que les hommes portaient à la boutonnière et les femmes sur le sein. Le corps des mariniers du Rhône suivait les chevaliers et distribuait des cocardes bleues, attachées avec du chanvre, et venaient ensuite tous les corps de métiers, chacun au rang qui lui était assigné par le cérémonial. La même procession était répétée le lendemain à l’issue de la messe mais alors les chevaliers étaient en costume, et des hommes désignés à cet effet et habillés uniformément allaient, vers midi, chercher la tarasque pour la conduire hors de la porte Jarnègues

La tarasque est la représentation d’un dragon monstrueux, dont le corps est un assemblage de cerceaux recouverts d’une toile peinte. Le dos est formé d’un énorme bouclier qui imite la carapace d’une tortue les pattes sont armées de griffes ; la queue est écailleuse et plusieurs fois recourbée ; la tête tient du taureau et du lion et une gueule béante laisse apercevoir plusieurs rangs de dents menaçantes. Cette monstrueuse figure était portée par une douzaine d’hommes au moyen de poignées qui saillent des deux côtés du corps, et un homme s’introduisait dans la cavité pour en faciliter les mouvements. Au moment ou la course allait commencer, l’un des chevaliers mettait le feu à des fusées qu’on avait introduites dans les narines de la tarasque. Cette machine était agitée en tous sens, comme si elle avait été animée par la fureur, et souvent des spectateurs, heurtés par elle, étaient renversés et meurtris, ce qui, du reste causait la risée et les huées publiques. Le nombre des courses était réglé, et lorsqu’elles étaient achevées, on portait la tarasque à l’église de Sainte-Marthe, où on lui faisait faire trois sauts en l’honneur de la sainte. Dans l’intervalle d’une course à l’autre, les chevaliers jouaient de la pique et les corporations exécutaient aussi leurs jeux. [1]

La fête a bien changée, mais en a gardé l’esprit. Les chevaliers de la Tarasque sont toujours là, la bête montée sur des roues traverse la ville en courant, mais sa queue n’est plus l’arme qui cassait les jambes des spectateurs dans la course folle à travers la ville. La course suffit. La course et les sauts. Mr le Maire juché sur la bête saute avec elle trois fois, en l’honneur de Sainte Marthe.

Le matin la Tarasque a donc débarquée, flanquée d’une autre légende locale. Le grand chasseur imaginé par Daudet a rejoint les fêtes tarasconnaises à la libération. Dans le roman, Tartarin et ses amis les chasseurs ont liquidé tout le gibier environnant. Pour ne pas perdre la main, il tirent aux casquettes après de pantagruéliques déjeuners dans la campagne.

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ils s’en vont en pleine campagne, à deux ou trois lieues de la ville. Ils se réunissent par petits groupes de cinq ou six, s’allongent tranquillement à l’ombre d’un puits, d’un vieux mur, d’un olivier, tirent de leurs carniers un bon morceau de bœuf en daube, des oignons crus, un saucissot, quelques anchois, et commencent un déjeuner interminable, arrosé d’un de ces jolis vins du Rhône qui font rire et qui font chanter.
Après quoi, quand on est bien lesté, on se lève, on siffle les chiens, on arme les fusils, et on se met en chasse. C’est-à-dire que chacun de ces messieurs prend sa casquette, la jette en l’air de toutes ses forces, et la tire au vol avec du 5, du 6 ou du 2, – selon les conventions.

Celui qui met le plus souvent dans sa casquette est proclamé roi de la chasse, et rentre le soir en triomphateur à Tarascon, la casquette criblée au bout du fusil, au milieu des aboiements et des fanfares. Inutile de vous dire qu’il se fait dans la ville un grand commerce de casquettes de chasse. Il y a même des chapeliers qui vendent des casquettes trouées et déchirées d’avance à l’usage des maladroits ; mais on ne connaît guère que Bézuquet, le pharmacien, qui leur en achète. C’est déshonorant ! [2]

Ainsi Tartarin défile à la tête de son escouade de chasseurs tirant sur tout ce qui bouge et sur tous les chapeaux lancés à son intention, jusqu’à la Mairie où Mr le Maire lui dit tout son bonheur de le voir revenir vivant de ce voyage en Afrique.

Le Corso 2009 se déroule en trois tableaux depuis la Tarasque des premières heures de la Chrétienté jusqu’aux fêtes de la libération en passant par la Tarasque de la Tradition Provençale.

Les tarasconnais viennent en nombre regarder ce long ruban qui enserre la ville dans ses costumes et musiques. Ils viennent en famille, tôt et s’installent confortablement à l’ombre sur des chaises pliantes... Toute une organisation.

Devant leurs yeux, la IVe légion et la Xe légion de César encadrent symboliquement Sainte Marthe ramenant la Tarasque. Suivent les Biges des attelages en Pays d’Arles. Fin du tableau sur la Tarasque à l’époque Paléochrétienne.

La transition s’opère avec la Tarasque au temps de Mistral et Daudet. Difficile de citer tous les groupes invités par la ville dans ce grand défilé... Les gardians et amazones de la Confrérie et de la Nacioun, les frisons des attelages en pays d’Arles et ceux de Dubois, Mlle Caroline Serre XXe Reine d’Arles et ses demoiselles d’Honneur Laure, Elodie, Marion et Anais, Reneissenço... Difficile de n’oublier personne.

Une page se tourne vers le dernier chapitre et les fêtes de la Tarasque à la Libération qui voient arriver un "Teur", Tartarin.
Et encore un flot de participants...

Un grand défilé rythmé par Le Condor, les tambours d’Orange, la Musique de la Légion Étrangère, La peña de Saint Etienne du Grès, La souco Tarascounenco, ou le réveil tarasconnais clôturant le cortège.

Une grande et belle fête à Tarascon ce dimanche...

[1Coutumes, mythes et traditions des provinces de France , Chesnel, Adolphe de (http://gallica2.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k670586)

[2Tartarin de Tarascon, Alphonse Daudet

Portfolio

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