Les félibres ont été accueillis par le sendi (responsable de la Maintenance) de Provence, Michel Benedetto qui avec les félibres des Alpes de Haute Provence, l’office de tourisme de la ville, ont organisé l’ensemble du Congrès et l’ont conduit avec beaucoup de compétence et d’efficacité, accueillis également par la municipalité de Gréoux en la personne de son Maire Monsieur Paul Audan.

Le Congrès a débuté le vendredi 9 mai à la Maison de Pauline par l’inauguration des expositions présentées par le Rode Osco Manosco sur "le Costume provençal d’hier et d’aujourd’hui" ainsi que "les félibres du pays manosquin". Une magnifique exposition des différentes pièces des costumes provençaux, tant masculin que féminin, comportant un très grand nombre de vêtements anciens magnifiquement conservés. Par ailleurs les félibres de Manosque et sa région étaient mis à l’honneur, le tout premier étant le Majoral Léon de Berluc-Perussis, théoricien du régionalisme, dont les idées restent pleinement d’actualité ; Albert Honde également, chef de gare à Manosque à l’époque où Frédéric Mistral venait "prendre les eaux" à Gréoux ; et aussi Raoul Arnaud, Jean Reille …

Le soir les Félibres ainsi que les gens du pays on fait "la Pegoulado" (retraite aux flambeaux), à Manosque, à l’occasion de la fête traditionnelle de la Sant Brancai (St Pancrace), montant jusqu’à la chapelle de "Toutes aures" en compagnie des "bravadaire" qui ont manifesté la ferveur populaire en tirant de très nombreux coups de fusil (à piston et, à blanc !).

Le lendemain, samedi 10 mai, était essentiellement réservé aux réunions de travail : d’abord réunion du Bureau Général du Félibrige faisant le point des activités des sept Maintenances félibéennes, ainsi que de la situation alarmante de l’enseignement de la langue d’Oc. Pendant ce temps les félibres pouvaient suivre une visite guidée de la cité de Gréoux.

Vers onze heures et demie les congressistes étaient reçus officiellement à la Maison de Pauline par la Municipalité et son Maire Monsieur Paul Audan, qui d’ailleurs tout au long de la Santo-Estello prononça tous ses discours en provençal... A cette occasion une plaque était dévoilée, elle rapellera à tous "présents et à venir" le souvenir de la Santo-Estello de Gréoux.

L’après-midi, en Mairie, se tenait le Consistoire du Félibrige, (réunion des Majoraux), il travailla sur de nombreux dossiers relatifs : au fonctionnement de l’association ; contre la volonté de certains de dénommer les habitants de la Provence par le terme blessant de "pacaiens" ; sur la nécessité de faire inscrire par l’ UNESCO la langue d’Oc, au patrimoine mondial de l’humanité ; au récent débat à l’Assemblée Nationale sur les langues régionales de France ; au rapport de la France à l’ONU sur les droits culturels et au contre-rapport présenté par le BELMR, dont le Félibrige est partie intégrante. Il a par ailleurs élu au cours de la séance trois nouveaux Majoraux.

Les félibres ont pu assister pendant ce temps à des animations et concerts. A partir de 17h 30, l’ancien Capoulié du Félibrige, M. Pierre Fabre, faisait une intéressante conférence, pétrie d’humour, sur " Mistral et la Haute Provence".

En soirée un grand spectacle "Haute Provence, terre de mémoire" présentait différents aspects de la culture provençale avec danse traditionnelle, danse moderne, chants et tambourinaires de Haute Provence, et aussi interventions remarquables de chanteurs piémontais et de danseurs irlandais.

Dimanche 11 dans l’amphitéâtre naturel du parc Morelon, une grand messe célébrée en langue d’oc par le vicaire général du diocèse de Digne, l’abbé Chave, et le Majoral-abbé Georges Passerat, rassemblait une très nombreuse assistance. Dans le même temps d’autres félibres suivaient une agréable visite guidée des oliveraies de Gréoux.

C’est vers 11h qu’un grand défilé, rassemblant une quinzaine de groupes d’Arts et traditions populaires traversaient toute la ville, montrant toute la diversité des costumes des Pays d’Oc. Félibres, participants du défilé et une foule d’autres personnes sont allés jusqu’à l’esplanade du château des templiers, qui a failli, malgré sa dimension, se révéler trop étroite ! Avant l’apéritif offert par la Municipalié, le Capoulié du Félibrige, M. Jacques Mouttet s’est plu à rappeler l’importance de maintenir les traditions, en particulier de porter les costumes traditionnels qui sont une preuve très visible et très vivante de la diversité des pays d’Oc, de l’attachement à la tradition et aux racines culturelles.

L’après-midi, “la Cour d’amour”, se déroulait au parc Morelon où sans doute un millier de personnes ont pu admirer danses et chants traditionnels présentés par une dizaine d’ensembles d’Arts et traditions populaires venus de tout les pays d’Oc et de Catalogne. La qualité des prestations n’a eu d’égal que la beauté et la variété des costumes.

A 17 h 30, se déroulait la séance académique des « Laus », les Majoraux, élus l’année précédente à Cahors, faisaient l’éloge de leurs prédécesseurs : la Majorale Marie-Noëlle Dupuis, par ailleurs Sendi du Languedoc, prononçait celui tout empreint d’émotion et de sentiments venus du cœur, de Pierre Azemard ; le Majoral René Raybaud celui de René Jonnekin, il a à cette occasion stupéfié l’auditoire en prononçant ce "laus" en vers ! chose qui ne s’est produite qu’une autre fois dans l’Histoire du Félibrige !

Le soir dans la salle l’Estelle, les félibres, des curistes et les habitants de Gréoux, comblaient la vaste salle en assistant à une soirée de théâtre en langue d’Oc. Une comédie intitulée "Photographie de famille" jouée par le Cercle provençal du Pays d’Apt, en particulier par Pierre Pessemesse qui est aussi l’auteur de cette comédie.

Spectacle remarquable aussi bien par la qualité du texte que par le jeu des acteurs.

Le lundi 12, toute la matinée, se déroulait le Conseil Général du Félibrige présidé par le Capoulié Jacques Mouttet. Rapports moral, rapport d’activité, rapport financier et projets d’avenir se sont succédés jusque vers 13 heures.

Au cours de cette assemblée de travail les félibres ont débattu d’un grand nombre de problèmes que rencontrent les langues régionales et la langue d’Oc en particulier.

Ainsi ont été évoqué successivement :

  • la volonté de poursuivre les actions de revendication en faveur de la langue d’Oc, en particulier de participer à une nouvelle manifestation de rue à l’automne 2009, dans une grande ville du Pays d’Oc, comme cela s’est fait en mars 2007.
  • la décision d’adresser à l’UNESCO, une délibération prise par les félibres pour demander que la langue d’Oc soit inscrite au patrimoine mondial de l’humanité.
  • la décision de protester officiellement contre la commission nationale de toponymie qui veut désigner les habitants de la Provence par le terme blessant de "pacaïens" !
  • le récent débat à l’Assemblée Nationale qui a beaucoup déçu les félibres, en effet la ministre de la culture, Madame Albanel, et le gouvernement en général, semblent ne vouloir tenir aucun compte des suggestions faites par un grand nombre de députés, à savoir : modifier l’article 2 de la Constitution et ratifier de la Charte européenne des langues minoritaires.
  • De plus les félibres, se sont montrés inquiets de la suppression d’un grand nombre de postes d’enseignants de langue d’Oc, de l’éventuel désengajement de l’état concernant FR 3 France BLeU, ce qui met en danger l’existence d’émissions en langues régionales.

Après le Conseil Général, les félibres se retrouvaient pour la “Taulejado de la Coupo” (Banquet de la Coupe).

C’est alors, qu’avant de boire à la “Coupo Santo” le Capoulié Jacques Mouttet dans son discours officiel en langue d’Oc, rappelait une fois encore que : Le Félibrige est un engagement digne et respectable qui doit faire valoir les droits d’une culture, d’une langue face aux responsables de l’Etat, auprès des ministères de l’Education ou de la Culture, tant qu’ils ne comprendront pas que les langues régionales ont un rôle éducateur, économique, social, civilisateur, à jouer et, qu’elles constituent la richesse patrimoniale de la France au même titre que les monuments ou les collections prestigieuses des Musées.

Ensuite ont été proclamés les trois nouveaux Majoraux élus par le Consistoire : Monsieur Paul Raynal, félibre limousin, résidant à Ecully près de Lyon ; Monsieur Michel Benedetto, félibre provençal et Sendi de la Maintenance de Provence, de Villeneuve, près de Manosque ; Monsieur Pierre Imbert, félibre provençal de Fréjus.

De plus deux Sòci (membre associé) du Félibrige ont été nommés, il s’agit du professeur Paul Lefin, de Liège, en Belgique, président de l’Union wallone ainsi que de l’AIDLCM, puis le professeur Sergio Gilardino, piémontais d’Italie, docteur des universités de Bologne et de Harvard, linguiste, spécialiste des langues minoritaires. Ce dernier a d’ailleurs été acclamé lorsqu’il a fait remarquer aux congressistes que : "Il ne faut plus parler de la lengo nostro, de notre langue étant donné que la langue d’Oc par son role prestigieux de langue littéraire internationale au moyen-age à l’origine d’une véritable renaissance littéraire européenne, étant donné qu’’elle a été honorée d’un prix Nobel avec Frédéric Mistral, cette langue appartient à l’Humanité ! "

Le soir, dans la salle l’Estelle, devant une salle comble, une fois de plus, les félibres et les habitants de Gréoux, des curistes, assistaient à une soirée de contes en provençal animée par Claude Coste et Jean-Pierre Béraud qui ont su mettre en valeur toute la richesse de notre langue (celle de l’humanité !), suivi de la chorale des Félibres bas-Alpin sous la direction de Daniel Guillot, qui a été remarquable dans ses interprétations.

Le mardi 13 une centaine de congressistes partaient en autobus en direction des Gorges du Verdon, s’arrêtant pour déjeuner à Moustiers Ste Marie où ils étaient accueillis en provençal par le Maire de Moustiers M. Alain Archiloque. Après le repas ils ont visité un atelier de faiences, le vilage et certains sont montés jusqu’à la chapelle Notre Dame de Beauvoir pour voir l’Etoile de plus près !

De retour vers dix-neuf heures à Gréoux, les félibres sont ensuite repartis chez eux, heureux d’une grande et belle Santo-Estello organisée et conduite, du début à la fin, de main de maître, par le Sendi Michel Benedetto, devenu entre temps Majoral du Félibrige, ainsi que toute son équipe, que tout le monde a remerciée et congratulée chaleureusement.

Jean-Marc Courbet
Baile dóu Felibrige