Confession d’Armoire
Une armoire s’ouvre et c’est toute la beauté de la Provence au travers de ses costumes que l’on découvre. Jérémy nous fait partager son amour pour les costumes Provençaux, de 1770 à 1870. Cela peut paraître peu dans le temps, mais c’est une période de mode provençale très riche.
Prenons le temps de regarder de plus près ces vêtements, car nous ne sommes pas dans le costume folklorique, mais bien dans le vêtement, que la femme provençale a su faire évoluer au gré des modes et de sa condition. Débutons notre découverte :
Nous voici avec " l’invité de l’empire ". Une robe de mousseline brochée de fleur magenta [1] avec un spencer en soie cannetillé vert anglais . Sur les épaules un fichu de soie vert ivoire et jaune est noué négligemment . Un tablier de mousseline finement brodé au ruban et un éventail complètent l’ensemble.
Le temps passe lentement et nous sommes sous la restauration en 1825, lors du règne de Charles X. Une belle robe à manches gigot de ramage montant de fleurs de campanule apporte cette fraîcheur que tant nous envient. Un fichu imprimé fond blanc en semis de fleurs avec une bordure de fleurs stylisée en "Boteh" (art décoratif perse) pare les épaules. Une ceinture de robe, faite dans la même indienne que la robe, marque la taille et la boucle en pointe de fer agrémente l’ensemble. Pour le volume, un jupon de crin est porté.
Chemin faisant, nous voilà vers 1830, d’une mode à l’autre, qui est une époque de transition entre la période Charles X que nous venons de voir et Louis Philippe. Car les évolutions se font au rythme de la vie de tous les jours et se faisant, les costumes glissent d’une époque à l’autre. Donc le haut de robe en indienne à fond bleu à ramage de boutons de fleurs rose et jaune est porté avec un jupon piqué fond vert à fleurs rayonnantes [2]. Un fichu imprimé grenat à fleurs "bâtons rompus" croisé à la taille. Le tablier en cotonnine (tissage de fil bleu et magenta) complète le tout. En accessoire, un porte louis.
Nous avançons un peu plus et nous découvrons un symbole de la monarchie sous le second empire 1850/1860. Un haut de robe à petites pagodes de coton imprimé prune à carreaux fleuris et une sur-jupe en coton imprimé de fleur de lys violine recouvrent un jupon piqué fond rouge à impression géométrique de rayures brun et pois blancs. Un fichu de mousseline brodé d’arabesques marron est croisé à la taille au dessus d’un tablier de soie noire Napoléon III.
Regardons maintenant cette artisane à la fin de la Monarchie de juillet 1845/1848. Elle porte une robe à fond beige picoté et impression de feuilles de vigne rouge et brun [3]. Le fichu est un imprimé de Phénix sur tronc d’arbre sinueux (remarquable travail d’impression). Le tablier est beige à deux poches à impression d’étoiles. Le jupon piqué impression à rayures brun et ocre se termine d’une base boutissée à la corde de motifs de rouage.
Nous sommes avec la grangière à la fin du second empire 1865/1870. Elle porte une robe de coton bleu imprimé de croisillons jaunes et blancs [4]. Sur les épaules, le fichu violine est imprimé de motif de feuilles de vigne, raisin et fleur. Le tablier imprimé mauve, prune, blanc et noir avec des impressions géométriques et fleuris en forme de rayure. Le volume est donné par un jupon piqué en sergé de coton indigo, avec un travail sur le bas, feuillage et marguerites [5].
Voici maintenant présenté l’effet crinoline 1860. Une robe crinoline de soie à carreaux vert et marron est rehaussée de passementerie. Un fichu de soie frangé broché de feuilles et fleurs, frise or géométrique en bordure pare les épaules. Un tablier d’apparat "Napoléon III" en soie marron brun à carreaux agrémente l’ensemble. L’effet crinoline est offert par un jupon motif " Mille fleurs" sur fond sable, avec un piquage du bas en guirlande fleurie [6].
Une autre élégance vers 1870 nous expose une robe en lainage noir imprimé de fleurette jaune [4]. La jupe de la robe a un sustèle de cordon d’attache pour permettre de la retrousser. Le tablier de soie brique a une poche plissée. Le fichu imprimé de fleurs et feuilles à bordure en guirlande fleuri habille les épaules. Le mannequin porte un jupon piqué de soie noir, qui donne le volume.
Continuons la visite de cette exposition avec un costume de commodité du var vers 1850. Un haut de robe en indienne à fond prune est un imprimé de rayure violine et de semi de fleurs. Un fichu rouille impression de roses et de fleurs, tampon d’impression (provenance Moscou) se croise sous poitrine. Le tablier est prune à damiers [7]. La jupe de siamoise rouge à fines raies blanches termine cet ensemble.
C’est maintenant vers un costume d’été fin XVIIIe 1785/1790 que notre attention se porte. Le corset souple en "indienne" imprimé à motif éventail (reconstitution dans une indienne d’époque) attire notre regard. Un fichu imprimé sur fond indigo de motif à pois jaunes sur carré central, avec une bordure fleurs et feuillage vert est obtenu par une surimpression de jaune sur le bleu [8]. Le tablier de "chintz" noir impression à la réserve de ramage montant, laisse découvrir le jupon piqué impression d’épis de blé jaune et fleurs à la réserve sur fond chocolat(indienne probablement d’une manufacture provençale).
Découvrons la grisette sous le second empire vers 1850. Elle porte un caraco d’indienne indigo imprimé de fleurs à petits caracaca. Notez que la manche gigot d’époque Charles X perdure durant tout le XIXème dans le Var. Un fichu de rouannerie turquoise et noir pointe le tablier. Un tablier enveloppant de coton tissé sur une jupe de siamoise indigo, rouge [9]. Une jupe de dessous d’hiver en lainage à carreaux et étamine de laine imprimé termine ce costume de travail.
Se présente à nos yeux maintenant un ensemble "en sur jupe" vers 1860. Un caraco à petits pagodes d’indienne à impressions géométrique beige et mauve. Le fichu d’indienne mauve hachuré et de fleurs stylisées en bordure rouge est rentré dans la jupe. En agrément le tablier de mousseline filure et imprimé nous fait découvrir le jupon piqué mille raies mauve et rouge [9] et la sur-jupe imprimée rayures ombrées et entrelacs orange.
La varoise en campagne vers 1870 porte un corset souple en "bazin" rose et blanc. Ses épaules portent un fichu de "rouannerie" qu’elle rentre sur sa poitrine dans le corset. Sa jupe est de siamoise indigo et fines rayures blanches, avec une sur jupe de coton tissé rouge et indigo. Un tablier enveloppant complète ce costume journalier.
Nous passons ensuite, devant le podium où Pierrette et ses deux amies nous attendent.
Une bourgeoise du début Louis Philippe vers 1830/1835 porte une robe Louis Philippe en voile de coton imprimé de rayures de fleurs "bâtons rompus" et d’ailes stylisées. Un fichu "canezou" de mousseline brodée de ramage et de marguerites avec une bordure festonnée brodée de motif "boteh" enveloppe ses épaules et descend sur ses hanches. Un ruban de ceinture en soie brochée de feuilles et pivoines en velours sabré et une bouche de ceinture "verroterie" mauve en laiton doré, affine la taille. Un jupon piqué de coton blanc, avec un bas boutissé d’une guirlande en feuilles (fin XVIIIe) finit l’ensemble.
Nous vous présentons enfin Pierrette en cravate et ramoneur vers 1835. Elle porte un caraco en laine imprimé "bayadère", avec manches bouffantes. Un fichu "ramoneur" couvre ses épaules et se croise sous la poitrine. Un tablier à fonds "ramoneur" de papillons et de libellules est porté sur un jupon piqué "ramoneur" ayant conservé son glaçage. Un fichu imprimé est noué en cravate autour de sa tête.
Et puis nous allons dans les rue de Grasse vers 1830 où nous y rencontrons cette robe impression de grands motifs de fleurs stylisées, imitant le "chiné à la branche" sur fond chocolat à ramage montant [3]. Un fichu frangé en crêpe de soie imprimé de motifs "à bâtons rompus", se croise sous la poitrine. Un tablier de soie bronze à deux poches avec un montage à plis plats sur ceinture de ruban picots agrémente un jupon piqué en coton blanc travaillé de motifs géométriques et guirlande alterné de cœurs.
Nous regardons maintenant le podium central où se trouvent quatre mannequins.
Tout d’abord voici "en casaquin et jupon piqué" vers 1775/1780. Un casaquin à la française ou "pet en l’air" en satin de soie rayée rose et blanc [10] avec des manches à "falbala" et bordures passepoilées, ainsi que des engageantes de mousseline brodée. Un fichu de mousseline brodé des "indes" au point de chaînette couvre la poitrine en pose légère. Un jupon piqué de satin de soie ivoire à motif d’écaille double piqure, coeur ailé surmonté d’un panache alterné de croix de "venasque" (époque 1770- fin de règne Louis XV) achève la tenue.
Puis nous allons vers la bastidanne marseillaise sous Louis XVI vers 1780/1785. Elle porte un caracaca en satin de soie parme brochée. Sur la poitrine est croisé un fichu de la manufacture royale de Jouy en Josas, avec en centre un imprimé de motif herbier sur fond blanc, en bordure, une guirlande fleurie (épis de blé, bleuets, œillets, marguerites..). Un tablier de chintz noir avec un ramage fleuri polychrome agrémente un jupon piqué dit "petit jardinier" à motif d’oiseaux de paradis sur arbrisseaux alternés de paniers fleuris. A noter une velette brodée de guirlandes fleuries à bordure festonnée [11].
C’est au tour d’une "robe retroussée dans les poches" vers 1775/1780 composée comme suit : elle consiste en un manteau de robe à la française en satin de soie rayée rose et blanc, avec des manches à "falbala" et passepoilées [10]. Le corps dur en soie XVIII [7] supporte un fichu de mousseline brodé des "indes" au point de chaînette noué sur la poitrine. Un fin tablier de mousseline brodé au "point d’épine" à guirlande de fleurs et feuilles, en bord de dentelles au "point d’esprit" allège le jupon piqué en taffetas d’Avignon jaune à double piqure, piquage de guirlande de fleurs.
Et nous arrivons déjà à la fin de cette présentation des costumes avec la "noblesse en Provence" vers 1775/1780. Un manteau de robe à la française en taffetas de soie rayé (Nîmes) rose, vert, blanc et falbalas sur ouverture, des manches sabot en bouillonné [12]. Croisé sur la poitrine, un fichu de mousseline brodé des "Indes" donne cet esprit de légèreté et de fraîcheur. Un tablier de mousseline de coton fileté et broché de fleurs, joue en transparence sur la jupe de soie rayée abricot, blanc, magenta.
Jérémy nous a ouvert son armoire. Ce fut un très belle exposition et j’espère que vous prendrez autant de plaisir que nous à travers cet article, que nous, qui avons pu la voir sur place.
[1] collection richard combe
[2] origine St Zacharie
[3] provenance de Grasse
[4] provenance du Vaucluse
[5] provenance Pourcieux
[6] provenance Var
[4] provenance Vaucluse
[7] reconstitution
[8] provenance Nîmes
[9] provenance Bras-Var
[10] provenance Garéoult, d’une maison secondaire de riches négociants marseillais
[11] provenance Marseille
[12] provenance St Jean de Vedas 34